Tout d'abord pour le présenter rapidement, c'est un historien spécialiste de l'histoire islamique du moyen-âge, il a obtenu son agrégation en histoire à Paris en 1962, et c'est un tunisien.
Pour faire simple, je conseille surtout ce livre à ceux qui connaissent déjà l'histoire du Prophète de l'islam dans les détails et veulent lire une analyse poussée des sira de la part d'un grand historien moderne, "un grand penseur" paraît-il. Car l'histoire du Prophète dans ce livre n'est pas détaillée comme dans les livres d'Ibn Kathir ou Tabari, cela n'aurait pas d'intérêt, l'auteur nous donne une analyse critique des sira. Et c'est cela qui est intéressant. L'affaire est sensible car les sira racontent assez sèchement des passages de l'histoire du Prophète Muhammad (pbsl) dont les authenticités ont été remise en question par nombre de savants musulmans ; on sait que les histoires des batailles du Prophète sont sans fondements à cause de beaucoup d'exagérations et de hadiths inventés selon Ahmad Ibn Hanbal. Mais il est intéressant d'avoir l'avis et l'analyse d'un historien moderne comme Hichem Djaït. Je mets uniquement les passages qui m'ont le plus marqué, ceci n'est donc pas un résumé de son livre.
- Il remet en cause quasiment tous les nombres des sira qui seraient selon lui amplifiés. Ceci même les chiffres qui donnent une image disant positive de l'islam, comme ceux qui donnaient une grande différence entre les combattants musulmans et les combattants ennemis. Par exemple lors de la prise de la Mecque, la sira dit que les musulmans furent entre 10 000 et 12 000 combattants, Djaït estime qu'ils n'étaient pas plus de 5000.
- Les histoires des sira sont peu plausibles, ceci à cause (selon moi) des centaines d'années qui séparent la mort du Prophète Muhammad de sa biographie.
- Il ne parle pas ni ne donne sont avis sur l'ordre supposée du Prophète de tuer tous les Juifs que les musulmans rencontreront après le meurtre du juif Ka'b Ibn Ashraf ce qui est dommage car son analyse aurait permis d'éclaircir ce hadith probablement inventé ou en tout cas mal interprèté par certains historiens modernes.
- L'affaire du massacre des Banu Qurayza est un roman pour lui : il remet en cause le nombre d'hommes exécutés estimant que leur nombre ne pouvait être aussi élevé ( 600 à 900) ; ils étaient probablement une centaine de personne pour une population totale de 500 à 600 habitants selon lui. C'était suite à leur trahison pendant le siège de Médine en 627. Par ailleurs, le Coran (Sourate 33, Verset 26) parle de asr (faire prisonnier) et non sabiy (capture de femmes et enfants) démontrant qu'il y avait aussi des hommes en âge de combattre qui furent capturés et que donc tous les hommes ne furent pas exécutés comme l'indique la sira d'Ibn Ishaq et de Tabari. D'ailleurs nous dit l'historien, pour les exécutions, seuls les noms des chefs des Banu Qurayza sont mentionnés alors que le récit raconte un fleuve de sang, c'est pourquoi il parle de roman macabre (il ne croit pas au grand nombre de tués). Pour finir, il mentionne le récits de certaines traditions qui font de Ali et Zubayr les seuls exécutants des 600 à 900 juifs, ce qui est invraisemblable selon lui.
- Il parle de l'exécution d'Asmaa Bint Marwan et d'Abu 'Afak sans les remettre en cause, il en parle comme si c'était un fait historique en tout cas rien à ses yeux ne permet d'en douter.
- Il explique la constitution de Médine qui fut rédigée en deux phases, en 622 et en 625 (avant Badr et avant Uhud).
- Il affirme qu'après la conquête de Khaïbar, soit en 628, le Prophète était devenu l'homme le plus riche du Hijaz. Il oublie de mentionner qu'il est pourtant mort quatre ans plus tard sans rien laissé en héritage et avait gagé son armure contre un gallon d'orge chez un juif, et en outre il était vêtu modestement d'après Bukhari entre autre. Il aurait été important que l'auteur du livre le précise car l'argent que possédait le Prophète ne servait que pour faire triompher l'islam.
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